"Peintures sonores françaises du XXème siècle"
Maurice Ravel (1903) : Quatuor à Cordes (30')
Germaine Tailleferre (1918) : Quatuor à Cordes (13')
Henri Dutilleux (1976) : Ainsi la Nuit (18')
Au tournant du XXe siècle, la musique française change de peau. Délaissant la rhétorique romantique, les compositeurs cherchent plutôt à peindre par le son : un art de la nuance, du timbre et de la lumière. Loin du drame, ils inventent une musique qui suggère plutôt qu'elle n'affirme, où chaque accord devient couleur.
Le Quatuor à cordes de Maurice Ravel (1903) prolonge l'élan debussyste tout en lui donnant une rigueur nouvelle. Derrière la sensualité des timbres et la lumière chatoyante des harmonies, Ravel construit un édifice d'une précision cristalline. Chaque mouvement explore une couleur, un éclat, une respiration: ici, la musique se fait image mouvante, dialogue de transparences et de reflets.
Quelques années plus tard, Germaine Tailleferre, unique femme du groupe des Six, poursuit cette quête d'élégance. Son Quatuor à cordes (1918-19) conjugue grâce, esprit et clarté formelle. L'héritage impressionniste y devient plus léger, plus diaphane : la mélodie s'efface au profit d'une écriture ciselée, ironique parfois, toujours pleine d'une délicatesse très française. Tailleferre y revendique une modernité sans heurts, toute en finesse et en équilibre.
Enfin, avec Ainsi la nuit (1976), Henri Dutilleux porte cet art de la suggestion à son apogée. Œuvre de lumière et d'ombre, elle abolit le temps linéaire pour construire un espace sonore où chaque résonance engendre la suivante. Ici, la musique ne décrit plus : elle évoque, respire, suggère.
Entre ces trois œuvres, un fil se tisse - celui du beau son, de la couleur devenue langage, de l'émotion qui naît du silence même.